Le Manteau d'Etienne-Martin

Publié le par la guide du rout'art

etienne.gifExposé pour la première fois à la galerie Breteau en 1962, Le Manteau ou Demeure V est considéré comme l'une des premières sculpture-vêtements du XXè siècle et selon le critique d'art  comme "un des hauts faits de la saison picturale" cette année-là. En effet, plus qu'une sculpture, ce manteau est une réelle oeuvre graphique, notamment par le jeu des cordes tressées, les différences de tissus et de métal. 

Le sculpteur Etienne-Martin (1913-1995) commence à partir de 1958 le cycle des Demeures, représentant à l'infini la maison de son enfance à Loriol-sur-Drôme, dont il dit : "Cette maison, c'est moi." A l'exception du Manteau, ses Demeures sont réalisées en matériaux dures, le bois, le bronze ou la pierre. 

Etienne-Martin entretient tout au long de sa carrière un lien privilégié avec l'architecture. Il crée des Demeures, dans lesquels on peut s'asseoir, déambuler où intérieur et extérieur sont entremêlés, en dialogues. Il donne une vision de la sculpture comme un creux habité. Le manteau entre dans cette notion. C'est un vêtement imposant qui enveloppe totalement le corps, comme une sorte d'armure, il pèse environ 80 kg et nécessite tout une cérémonie pour l'enfiler. Cérémonie que l'auteur s'amuse à montrer et à effectuer, préfigurant les performances d'artistes nombreuses dans l'art contemporain. 

De plus, ce manteau possède une allure tribale, par cette accumulation de motif. Il semble que chacun possède une signification précise et mystérieuse, seule connue de celui qui porte le manteau, comme un chaman. 

Etienne-Martin explique dans une interview : "Le Manteau, c'est la même chose que la Demeure 10 ou que l'Abécédaire : il résume tout le reste." L'abécédaire est un système complexe créé par l'artiste. Chaque lettre de l'alphabet correspond à une pièce de sa maison d'anfance, à une période de sa vie et enfin à une ou plusieurs sculptures. Une quantité de schémas, dessins, cahiers, un livre-objet représente ce système qui varie légèrement au cours de sa vie. Ainsi, il lie toute son oeuvre et toute sa vie à cette maison d'enfance.

Il s'agit en réalité de deux maisons collées, il devait passait de l'une à l'autre par le grenier ou la cave, une maison sans doute fascinante pour un enfant. Etienne-Martin se voit obligé de la vendre en 1945 après la mort de ses parents, c'est pour lui une déchirure qui transforme radicalement et définitivement son art, auparavant plus traditionnel. 

Avec ce Manteau, Etienne-Martin se détache des limites traditionnelles de l'art, il sort de l'enseignement qu'il a eu aux Beaux-Arts et à l'Académie Ranson. Il concentre alors son art sur son moi dans une démarche autobiographique, voire exorciste. Il est souvent comparé à Louise Bourgeois pour cela. Cette nouvelle approche de l'art va perdurer jusqu'à aujourd'hui chez de nombreux artistes, utilisant leur vécu le plus intime pour créer. 

Publié dans Oeuvres

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